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Prologue

J’ai vécu un épuisement général qui s’est traduit par deux effondrements simultanés : l’un physique, l’autre psychique. C’était il y a environ trois ans. Mais c’était aussi hier car il faut du temps pour retrouver un équilibre. Et c’est aussi aujourd’hui car je porte toujours en moi certains stigmates de cet évènement. C’est enfin demain car une telle épreuve m’a imposé une mue en profondeur, à travers la souffrance, pour affronter ma vérité.

J’ai ressenti le besoin d’écrire ce que j’avais vécu.
Pour tourner la page.
Pour témoigner, aussi. Auprès de mes proches car aussi proche soit-on de quelqu’un qui souffre, on ne peut guère appréhender ce qu’il vit vraiment. Et plus largement pour tous les naufragés égarés dans ce type de tempête… et j’en croise tous les jours.
Pour transmettre, enfin, la richesse d’une telle épreuve. Car il serait erroné de considérer que ce type d’expérience ne concerne que celui qui la vit. Ce que j’ai vécu est un concentré de vie. De la même façon que le microscopique est directement lié au macroscopique, j’ose croire qu’une telle leçon de vie comporte de nombreux aspects universels.

Ces trois années ont tout changé dans ma vie  : mes croyances, mon hygiène et mon mode de vie, ma capacité émotionnelle, mes relations aux autres et au monde, mon rapport au travail ou à la spiritualité… Trois années de transition, de cheminement qui englobent tout ce que la souffrance humaine, depuis l’illusion jusqu’à la guerre en passant par la maladie ou la solitude, peut recouvrir. Je n’ai aucune leçon à donner ; je veux simplement partager.

J’ai choisi de raconter ce que j’ai ressenti. Pas ce que j’ai fait ou ce que j’aurais compris  ; mais ce que j’ai vécu. C’est parfois subjectif, souvent incomplet, toujours authentique. Parce que la souffrance est d’abord un ressenti, si impossible à partager. Mais aussi parce qu’une des véritables causes de cette souffrance, j’en suis aujourd’hui convaincu, est le contrôle émotionnel que j’ai opéré toute ma vie, jusqu’à devenir un véritable «  handicapé émotionnel  ». Incapable de reconnaître mes émotions face à des contraintes extérieures auxquelles j’ai fini par m’adapter, ma vie est indiciblement devenue un tableau que je contemplais… un tableau dont je ne faisais pas partie ! Et c’est ce refoulement qui s’est transformé, au fil du temps, en souffrance réelle, véritablement handicapante  ! Alors partager, comme pour matérialiser le début de la fin de ce mécanisme destructeur. Parce qu’une émotion existe pour être reconnue et partagée.

Peut-être se trouve là le principal écueil de l’aventure humaine moderne : l’empêchement émotionnel…

Ardèche – Septembre 2012